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La prime discrétionnaire connaît-elle des limites ?

  • cyrillecatoire
  • il y a 18 minutes
  • 3 min de lecture

Très usitée dans certains secteurs, en particulier le secteur bancaire, la prime discrétionnaire consiste en un bonus dont l’attribution et le montant dépendent exclusivement de l’employeur, disposant en la matière d’une libre appréciation.


Si la validité de ce type de prime ne fait désormais plus débat, tant son principe a été validé par la jurisprudence, il n’en reste pas moins que des limites, parfois oubliées, perdurent pour éviter certaines dérives.

 

1.       La notion de prime discrétionnaire


Le contrat de travail peut prévoir, en plus de la rémunération fixe, l'attribution d'une prime laissée à la libre appréciation de l'employeur dans ses modalités de calcul comme dans son versement.


On parle de « prime discrétionnaire », dispositif validé par la jurisprudence (Cass. soc. 10 octobre 2012, n° 11-15.296).


Dispositif très pratique pour l’employeur, la prime discrétionnaire évite a priori tout risque de devoir verser une prime déterminée à un salarié, l’employeur pouvant déterminer à tout moment si un versement interviendra ou non, sans avoir à en justifier.


L’existence d’une telle prime permet par ailleurs de conserver les salariés inciter à se dépasser, ceux-ci restant en permanence dans l’incertitude concernant le montant de la prime à percevoir.

Mais comme tout principe en droit, la liberté de l’employeur n’est pas sans limite.

 

2.       La nécessité de respecter le principe d’égalité de traitement


La liberté de l’employeur n’est pas absolue puisqu'il ne peut pas s'affranchir du respect du principe d'égalité de traitement (Cass. soc. 10 octobre 2012, n° 11-15.296).


Ainsi ne constitue pas un élément objectif et pertinent susceptible de justifier une différence de rémunération au regard du principe « à travail égal, salaire égal » l'exercice de son pouvoir discrétionnaire allégué par l'employeur pour décider, sans autre motif, d'attribuer ou non à ses salariés une prime annuelle variable dont il fixe seul le montant (Cass. soc. 30 avril 2009, n°07-40.527).


L’employeur ne peut donc opposer son pouvoir discrétionnaire pour se soustraire à son obligation de justifier de façon objective et pertinente une différence de rémunération entre des salariés placés dans une même situation.


En d’autres termes, l’employeur devra être à même de s’expliquer sur la différence de traitement entre des salariés occupant un même poste, sous peine de se voir condamner à verser aux salariés concernés le bonus dont ils ont été privés.

 

3.       L’interdiction de la sanction pécuniaire prohibée


Certains employeurs ont cru bon pouvoir se retrancher derrière le caractère discrétionnaire de la prime pour éviter le paiement d’un bonus à des salariés faisant l’objet d’un licenciement.


Ce phénomène n’est pas passé inaperçu, les juges veillant à ce que, sous couvert du caractère discrétionnaire d’une prime, l’employeur ne procède pas à une sanction pécuniaire illicite du salarié, et ce en contraignant l’employeur à justifier des raisons objective du versement ou non versement de cette prime discrétionnaire au salarié (CA Nimes, 15 novembre 2016, n° 15/00672 ; CA Versailles, 7 juillet 2016, n° 14/03757).


En effet, le code du travail interdit les amendes « ou autres sanctions pécuniaires » et ajoute que « toute disposition ou stipulation contraire est réputée non écrite » (C. trav., art. L. 1331-2).


Les réductions ou suppressions de prime en fonction de considérations disciplinaires sont illicites (C. trav., art. L. 1331-2).


Constituent ainsi une sanction pécuniaire prohibée la privation d'une prime de fin d'année en raison d'une faute grave (Cass. soc., 11 févr. 2009, n° 07-42.584).


Les entreprises sont ainsi régulièrement condamnées pour des bonus discrétionnaires, versés de manière constante pendant des années, puis soudainement non octroyés lors de l’engagement d’une procédure de licenciement (en ce sens : CA Paris, 12 octobre 2023, n°20/03035).

 
 
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